La procédure de licenciement d’un agent contractuel de la fonction publique impose le respect d’un formalisme.
Ce formalisme, nécessaire au respect des droits et intérêts de l’agent, intègre, notamment, l’obligation, pour l’administration, de respecter un préavis. Et, le Conseil d’État vient récemment de préciser que le non-respect de ce préavis n’emporte plus illégalité de la décision de licenciement.
Le droit au préavis en cas de licenciement d’un contractuel de la fonction publique
Un droit au préavis consacré dans les trois fonctions publiques
Qu’il soit recruté par contrat à durée indéterminé ou à durée déterminée, l’agent contractuel de la fonction publique de l’État, territoriale ou encore hospitalière, licencié avant le terme de son contrat, a le droit au respect d’un préavis :
- – pour la fonction publique de l’État : article 46 du n° 86-83 du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels de l’État pris pour l’application des articles 7 et 7 bis de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État ;
- – pour la fonction publique territoriale : article 40 du décret du 15 février 1988 pris pour l’application de l’article 136 de la loi du 26 janvier 1984 ;
- – pour la fonction publique hospitalière : article 42 du Décret n° 91-155 du 6 février 1991 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels des établissements mentionnés à l’article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière.
Attention, si ce droit au préavis est reconnu en cas de licenciement, l’agent contractuel ne saurait s’en prévaloir dans le cas où le licenciement est prononcé pour un motif disciplinaire.
La détermination de la durée du préavis en cas de licenciement
Ce droit au préavis est identique dans les trois fonctions publiques :
- – huit jours pour les agents qui ont moins de six mois de service ;
- – un mois pour ceux qui ont au moins six mois et, au plus, deux ans de service ;
- – deux mois pour ceux qui ont au moins deux ans de service.
Il en est de même pour la méthode de calcul de l’ancienneté de l’agent, nécessaire pour déterminer la durée du préavis :
« l’ancienneté est décomptée jusqu’à la date d’envoi de la lettre de notification du licenciement. Elle est calculée compte tenu de l’ensemble des contrats conclus avec l’agent licencié, y compris ceux effectués avant une interruption de fonctions sous réserve que cette interruption n’excède pas quatre mois et qu’elle ne soit pas due à une démission de l’agent »
(article 46 ; article 40 et article 42 susvisés).
Conséquences du non-respect du préavis sur la légalité de la procédure de licenciement d’un agent public
Le respect du préavis de licenciement est obligatoire.
L’illégalité initiale de la décision de licenciement, en cas de non-respect du délai de préavis
Ainsi, le Conseil d’État a, initialement, jugé que le non-respect du délai de préavis avait pour effet de vicier la décision de licenciement :
« Considérant qu’en application des dispositions combinées des articles 39 et 40 du décret du 15 février 1988 susvisé, le licenciement de M. A ne pouvait intervenir qu’après un préavis d’au moins deux mois ; qu’il est constant que l’arrêté attaqué ne respecte pas cette durée de préavis ; qu’il est ainsi entaché d’illégalité ; que M. A est, dès lors, fondé à en demander l’annulation »
(CE, 14 mai 2007, n° 273244).
Un revirement jurisprudentiel opéré : le non-respect du préavis n’emporte plus illégalité de la décision de licenciement
Par un avis du 4 février 2022, le Conseil d’État a précisé les conséquences attachées au non-respect du préavis lors du licenciement d’un agent contractuel.
Dans un premier temps, le Conseil d’État rappelle qu’il résulte des dispositions de l’article 40 du décret du 15 février 1988 pris pour l’application de l’article 136 de la loi du 26 janvier 1984 que l’agent non titulaire de la fonction publique territoriale recruté pour une durée indéterminée ou pour une durée déterminée ne peut être légalement licencié avant le terme de son contrat par l’autorité territoriale compétente qu’après un préavis, sauf si le licenciement est prononcé pour des motifs disciplinaires ou au cours ou à l’expiration d’une période d’essai.
C’est, donc, dans un second temps, que le Conseil d’État opère un revirement en indiquant que :
« la circonstance que le préavis auquel l’agent non titulaire avait droit n’a pas été respecté par la décision de licenciement n’est pas de nature à entraîner l’annulation totale de cette décision, mais la rend seulement illégale en tant qu’elle prend effet avant l’expiration du délai de préavis applicable »
(CE, avis, 4 février 2022, n° 457135).
Le Conseil d’État opère une juste distinction entre, d’une part, le bien-fondé du licenciement et, d’autre part, la prise d’effet du licenciement.
A noter que si cet avis concerne la procédure de licenciement dans la fonction publique territoriale, il ne fait aucun doute que ce revirement sera transposé aux deux autres fonctions publiques tant la rédaction des dispositions relatives au licenciement sont identiques.
Conséquences pratiques du non-respect du préavis : la légalité de la décision de licenciement mais le droit à une indemnité pour l’agent public
La violation du droit au préavis, si elle n’emporte plus l’illégalité de la décision de licenciement, ouvre, tout de même, droit pour l’agent contractuel, privé d’une garantie procédurale, à une indemnité.
Cette indemnité correspond au « préjudice résultant de cette privation, dont il revient au juge administratif, saisi de conclusions à cette fin, de fixer le montant » (CE, avis, 4 février 2022, n° 457135).
L’agent ainsi licencié sans respect du préavis a droit à une indemnité calculée au regard de la prise d’effet corrigée du licenciement, c’est-à-dire une prise d’effet conforme au préavis réglementaire.
Cette nouvelle prise d’effet affectera nécessairement :
- – l’indemnité de préavis ;
- – l’indemnité de congés payés ;
- – l’indemnité de licenciement.
Bien évidemment, en vertu des dispositions de l’article R. 421-1 du code de justice administrative, il appartiendra à l’agent aux intérêts duquel il a été préjudicié de lier le contentieux en adressant une demande indemnitaire préalable à son ancien employeur.
Attention, s’agissant d’une procédure de plein contentieux, il est nécessaire de se rapprocher d’un avocat expert en droit public, condition de recevabilité de l’action judiciaire.