La réparation des préjudices liés à l’amiante bénéficie d’un régime spécifique en train les mains du Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante (FIVA).
Ce fonds a été créé avec l’article 53 de la Loi n° 2000-1257 du 23 décembre 2000 de financement de la sécurité sociale pour 2001.
L’une des prérogatives du FIVA est de pouvoir se subroger dans les droits des victimes qu’il indemnise.
Rappel synthétique des objectifs et missions du Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante
L’objectif du Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante (FIVA) est de réparer les préjudices :
- – des personnes qui ont obtenu la reconnaissance d’une maladie professionnelle occasionnée par l’amiante au titre de la législation française de sécurité sociale ou d’un régime assimilé ou de la législation applicable aux pensions civiles et militaires d’invalidité ainsi que de leurs ayants droits ;
- – des personnes qui ont subi un préjudice résultant directement d’une exposition à l’amiante sur le territoire de la République française ainsi que leurs ayants droits.
Bien évidemment, un ayant-doit n’obtiendra une indemnisation sous réserve de démontrer la preuve d’un lien de causalité entre le décès de la victime et le préjudice subi (Cass, 24 mai 2006, n° 05-18.663, dans cette affaire, le préjudice du petit-fils né huit ans après le décès de la victime de l’amiante n’était pas démontré).
A noter que la liste des maladies dont le constat vaut justification de l’exposition à l’amiante est fixée par l’arrêté du 5 mai 2002.
Le Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante assure, ainsi, la réparation intégrale des dommages subis par les victimes de l’amiante dès lors que les conditions d’indemnisation tenant à l’exposition à l’amiante, à la victime et à la nature du préjudice subi sont réunies.
Le recours subrogatoire du Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante
Ce recours subrogatoire est prévu au VI de l’article 53 de la Loi n° 2000-1257.
Le principe du recours subrogatoire du Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante
Cette action récursoire, à concurrence des sommes versées, concerne tous les droits que possède le demandeur contre :
- – la personne responsable du dommage ;
- – les personnes ou organismes tenus à un titre quelconque d’en assurer la réparation totale ou partielle.
La subrogation s’effectue nécessairement dans la limite du montant des prestations à la charge desdites personnes.
Cette action est recevable devant toutes les juridictions (judiciaires, pénales et administratives).
A noter que la jurisprudence administrative a dû confirmer la recevabilité d’une telle subrogation devant les juridictions administratives dans la mesure où l’article 53 de la Loi n° 2000-1257 ne vise que les actions civiles et répressives :
« Considérant que par ces dispositions le législateur a posé le principe de la subrogation du fonds dans les droits que possède le demandeur contre toute personne responsable du dommage ; que la circonstance que le législateur a précisé les conditions d’intervention du fonds dans l’exercice de l’action subrogatoire devant les juridictions civiles ne peut, à défaut de mention expresse dans ce sens, exclure l’exercice de l’action subrogatoire contre les personnes publiques devant la juridiction administrative ; que la circonstance que l’Etat participe au financement du fonds n’est pas de nature à priver cet établissement public de la faculté d’engager une action récursoire contre l’Etat lorsque celui-ci est responsable du dommage causé à une victime dont le fonds a réparé le préjudice ; qu’en l’absence de toute limitation par la loi des conditions d’exercice de l’action subrogatoire du fonds, les ministres compétents ne pouvaient, pour des motifs d’opportunité, en limiter l’exercice sans méconnaître les dispositions précitées de l’article 53 de la loi du 23 décembre 2000 ; » .
(CAA Versailles, 13 mars 2007, n° 05VE01608).
Cette action est recevable alors même que les fonds n’ont pas encore été versés sous réserve que le Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante démontre, avant que le juge ne statue, s’être acquitté du paiement des sommes offertes et acceptées au titre de l’indemnisation consécutive à la maladie professionnelle (en ce sens, Cass, 27 mai 2021, n° 19-24.508).
Quid de l’action récursoire du FIVA lorsque l’employeur fautif est en liquidation judiciaire ?
Dans un arrêt récent (Cass., 13 Octobre 2022, n° 20-21.276), la Cour de cassation apporte des éléments de réponse interessants pour régler le cas où l’employeur est en liquidation judiciaire.
Ainsi, dans cette affaire, les ayants droits d’une victime de l’amiante ont sollicités devant le juge la reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur. Le Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante les a subrogés dans leurs droits, en raison de l’indemnisation versée par le Fonds aux victimes.
La Cour d’appel d’Amiens a jugé que la maladie professionnelle et le décès étaient la conséquence de la faute inexcusable de la société employeur, société en liquidation judiciaire.
Par ailleurs, la Cour d’appel d’Amiens précise que les sommes versées ou à verser par le FIVA peuvent être récupérées sur la société employeur. Mais dans la mesure où cette société est en liquidation judiciaire, la Cour d’appel d’Amiens ajoute que la créance du FIVA doit être inscrite au passif de la liquidation judiciaire de la société employeur.
La Cour d’appel a, donc, refusé de condamner la caisse primaire d’assurance maladie à verser directement au FIVA les sommes versées à la victime et aux ayants droit.
Dans ces conditions, le FIVA a formé un pourvoi en cassation.
En effet, aux termes de l’article L. 452-3 du code de la sécurité sociale, la réparation des préjudices allouée en cas de faute inexcusable à la victime ou à ses ayants droit est versée directement aux bénéficiaires par la caisse primaire qui en récupère le montant auprès de l’employeur.
Et, dans la mesure où le FIVA dispose de la possibilité de se subroger dans les droits de la victime et de ses ayants droit en vertu des dispositions de l’article 53 de la Loi n° 2000-1257, la lecture combinée de ces dispositions a conduit la Cour de cassation a annulé l’arrêt de la Cour d’appel :
« 5. Pour dire que le FIVA peut récupérer sur l’employeur, auteur de la faute inexcusable, et non sur la caisse, les sommes versées ou à verser au titre des préjudices personnels de la victime et des préjudices moraux des ayants droit, l’arrêt retient que si le Fonds dirige sa demande à l’égard de la caisse, manifestement en raison du fait que l’employeur est en liquidation judiciaire, seule la fixation de sa créance au passif de cette procédure peut être ordonnée.
(Cass., 13 Octobre 2022, n° 20-21.276).
6. En statuant ainsi, la cour d’appel a violé les textes susvisés » .
La Cour de cassation tire les conséquences du pouvoir de subrogation entre les mains du FIVA et lui confère sa pleine mesure.
Autrement dit, toutes les actions offertes aux victimes de l’amiante et leurs ayants droit sont ouvertes, dans les mêmes conditions au FIVA.
Bien évidemment, cette action récursoire, comme indiqué précédemment, s’exerce dans la limite des sommes versées.