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Indemnisation du candidat évincé : comment passer de la 4ème place à une chance sérieuse de remporter le contrat

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Indemnisation du candidat évincé

C’est l’une des batailles d’un long combat entamé depuis 13 ans.

Notre cliente, une société d’économie mixte d’aménagement varoise, avait été évincée de la passation de la concession d’aménagement conclue par la Ville de Saint-Tropez pour l’aménagement de trois secteurs de son centre-ville.

Cette éviction illégale cause un préjudice à notre cliente. Nous engageons un recours indemnitaire en 2016 pour obtenir l’indemnisation de ce candidat évincé.

Premier volet : le combat pour l’annulation de la concession d’aménagement

Long combat écrivais-je, car il débute en réalité avec l’introduction, en 2011, de ce qu’on nommait alors un recours Tropic.

Le Tribunal administratif de Toulon nous donne raison, car il relève trois illégalités, mais refuse l’annulation de la concession pour motif d’intérêt général dans un jugement de 2013, reçu par fax à l’époque – oui, ça ne nous rajeunit pas (TA Toulon, 17 juillet 2013, n°1102805). 

La Cour administrative d’appel de Marseille rejette notre appel, avec une motivation bancale (CAA Marseille, 27 octobre 2014, n°13MA03008).

Tellement bancale que le Conseil d’État (CE, 12 novembre 2015, n°386578), devant lequel notre cliente a formé un pourvoi, décide :

  • d’annuler l’arrêt ;
  • que la concession attaquée est frappée de graves illégalités ;
  • de renvoyer l’affaire…à la CAA de Lyon pour que cette dernière tranche au fond les conséquences de l’illégalité du contrat.

Précision : le rapporteur public, Monsieur Olivier Henrard, avait conclu à l’annulation de la concession lors de cette audience.

A partir de ce moment, les graves illégalités affectant la concession sont gravées dans le marbre.

La CAA de Lyon refuse d’annuler, estimant qu’une annulation porterait une atteinte excessive à l’intérêt général (CAA Lyon, 22 juin 2017, n°15LY03697).

Le Conseil d’État est saisi une seconde fois. 

Et, coup de tonnerre dans le monde policé du contentieux contractuel : la concession conclue par la Ville de Saint-Tropez pour l’aménagement des quartiers lice, couvent, hôpital, est annulée par un arrêt publié au recueil et largement commenté par ailleurs (CE, 15 mars 2019, n°413584).

L’indemnisation du candidat évincé illégalement : chance sérieuse ?

Après un recours indemnitaire préalable, nous saisissons le Tribunal administratif de Toulon en 2016 pour obtenir réparation pour notre client.

Classiquement (CE, 18 décembre 2020, n°429768) :

  • si vous étiez dépourvu de toute chance de remporter le contrat : vous n’avez droit à aucune indemnisation ;
  • si vous n’étiez pas dépourvu de toute chance, vous avez le droit d’être indemnisé des frais de constitution de votre offre ;
  • si vous aviez une chance sérieuse de remporter le contrat, vous êtes indemnisé de votre marge nette manquée.

Difficulté du combat pour nous : notre client était classé en 4ème position.

Nous savons que ce classement en 4ème position n’était que le fruit des irrégularités ayant émaillé la procédure de passation, de la « volonté de favoriser un candidat » retenue par le Conseil d’État.

Mais il fallait désormais le démontrer au juge administratif.

Le TA de Toulon estime que notre client n’était pas dépourvu de toute chance de remporter la concession et lui accorde l’indemnisation des frais de constitution de son offre
(97 450 euros HT).

Nous interjetons appel.

Notre approche : démontrer que chaque illégalité a artificiellement déclassé notre client

C’est alors qu’a commencé un travail de fourmi : prendre les notes attribuées pour chaque sous-critère et montrer qu’elles ont toutes été sous-évaluées.

Nous avons démontré que la note appliquée pour le sous-critère valeur technique et financière était arbitrairement sous-évaluée. La note médiocre s’appuyait sur le sentiment selon lequel le projet ne reposerait « que sur un seul homme », au motif que le Directeur Général de notre client s’était présenté seul en audition. Cette seule circonstance n’était pas de nature à justifier une note aussi basse, alors que nous démontrions que « l’expérience la plus significative en qualité́ d’aménageur et en matière de construction de logements sociaux ».

Nous avons également convaincu la Cour de ce que cette note a également pu être influencée par le fait que notre client était le seul des quatre candidats à n’avoir pas été assisté, en négociation…par l’architecte de la Ville (oui, vous lisez bien) !

La note attribuée ensuite au sous-critère qualité de la méthodologie, valeur technique de la réponse trouve sa seule explication dans l’affirmation de la Commune selon laquelle notre client aurait remis des offres entraînant un risque de requalification. 

C’était faire fi de ce que notre cliente avait déposé une offre de base intégralement conforme au cahier des charges. Le déclassement de son offre est donc, là encore, injustifié.

S’agissant enfin du sous-critère délai la Commune a noté un second planning remis, sur demande de cette dernière, par notre client.

Problème : notre client précisait que ce nouveau planning ne valait pas dans l’hypothèse de logements conventionnés. Dans cette hypothèse, il fallait prendre en compte le premier planning remis par notre client, qui avait obtenu la meilleure note.

Alors que des logements conventionnés étaient prévus, la Commune a néanmoins noté le second planning, qui ne valait pourtant pas.

La Cour estime que « ces différentes irrégularités, qui ont conduit à l’éviction de la » société d’économie mixte « ont privé cette dernière d’une chance sérieuse de remporter la concession d’aménagement ».

Ce que nous avons obtenu pour notre cliente

Nous avons donc démontré que l’offre de notre client avait une chance sérieuse de remporter la concession.

La Cour administrative d’appel de Marseille ordonne une expertise judiciaire pour chiffrer le manque à gagner subi par notre client. 

C’est la prochaine bataille de cette saga judiciaire entamée en 2011.

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