L’une de nos clientes, collectivité territoriale, se voyait réclamer une indemnisation par un piéton qui était tombé sur un pavé déchaussé en se promenant sur la place centrale de la commune. Cette chute sur la voie publique avait causé une fracture au poignet de l’usager.
La victime de l’accident estimait que ce dernier était dû à un défaut d’entretien normal de la place, ouvrage public, par la ville. En conséquence, elle lui demandait des dommages et intérêts de 15 000 euros au titre des préjudices corporels subis. Après avoir formé une réclamation devant la commune, elle avait introduit un recours en indemnisation devant le tribunal administratif de Rouen.
L’enjeu : démontrer l’absence de défaut d’entretien normal de la voie publique pour dédouaner la commune
Les collectivités territoriales sont tenues d’assurer la sûreté sur la voie publique (chaussée, trottoir, place, …). Lorsque la voie publique est en mauvais état, mal entretenue, et que ce défaut d’entretien cause un accident, la responsabilité de la personne publique est présumée.
Dans notre cas, il était certain que l’accident ainsi survenu était la cause des blessures de la victime. En d’autres termes, d’un point de vue juridique, le lien de causalité entre la chute et le préjudice était établi. Il fallait donc démontrer que la mairie avait normalement entretenu l’ouvrage public pour l’exonérer de sa responsabilité.
Un accident imputable à un défaut d’attention du piéton et non à un défaut d’entretien de l’ouvrage public
Nous avons apporté au tribunal la preuve que l’aspérité créée par le pavé présenté comme déchaussé était minime. La différence de niveau n’était en effet que de 2,5 cm.
La chaussée était effectivement irrégulière mais la place n’était pas en mauvais état. Le tribunal administratif a donc considéré qu’il s’agissait d’un risque auquel un piéton normalement attentif doit s’attendre. La victime aurait dû se prémunir contre ce risque normal en prenant les précautions nécessaires.
Le juge a souligné que l’usager ne pouvait ainsi reprocher aucun défaut d’entretien normal à la commune. La ville a dès lors vu sa responsabilité épargnée.
Absence de signalisation du danger sur la voie publique : pas de faute du maire dans l’exercice de ses pouvoirs de police
D’autres accidents avaient déjà eu lieu sur cette place. Dès lors, la victime estimait que le maire de la commune aurait dû mettre en place une signalétique adaptée pour éviter toute nouvelle chute sur la voie publique.
En effet, en droit administratif, lorsqu’un défaut d’entretien d’un ouvrage public est source de danger potentiel, le maire est tenu de procéder à la signalisation de ce danger, dans le cadre de ses pouvoirs de police administrative.
Ici, nous avons expliqué au tribunal que le nombre de pavés concernés par un descellement était faible. Il n’y avait donc pas de faute dans l’exercice des pouvoirs de police du maire. Le juge administratif nous a suivis, précisant que le maire n’était pas tenu de mettre en place une signalétique spécifique.
Ce que nous avons obtenu pour notre cliente
Grâce à la stratégie contentieuse mise en place, nous avons dans ce jugement obtenu le rejet de l’intégralité des demandes de la victime de la chute.
Des économies directes et indirectes pour la collectivité
Notre intervention a permis, pour la commune :
-> une économie immédiate de 15 000 euros, correspondant aux dommages et intérêts réclamés par la victime au titre de ses préjudices corporels ;
-> une économie indirecte plus large car une décision retenant la responsabilité de la commune aurait pu être exploitée par d’autres victimes d’une chute sur la voie publique pour demander à leur tour une indemnisation.
Lire le jugement du tribunal administratif de Rouen du 23 mai 2019
Notre conseil pratique d’avocat
Nous conseillons toujours aux collectivités, lorsqu’un danger est identifié sur un ouvrage public, de signaler ce danger. La même recommandation vaut dans le cadre de travaux publics.
Un panneau ou un arrêté, affiché sur site, doit mentionner clairement le risque et formuler les précautions particulières à prendre. Par exemple, pour un miroir d’eau : « ne pas laisser les mineurs sans surveillance ». Ou, s’agissant d’un trottoir en mauvais état et dans l’attente des travaux de réparation : « Danger – Chaussée défectueuse – Merci de traverser ».
Les collectivités limitent ainsi le risque juridique de recours contentieux ou, en cas de recours, celui d’être reconnues responsables.