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Recours contre une autorisation d’urbanisme : attention à sa qualité à agir

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démolition - autorisation d'urbanisme et qualité à agir

En cas de recours contre une autorisation d’urbanisme, l’absence de qualité à agir ne pardonne pas. Le juge administratif n’hésite pas à conclure à l’irrecevabilité de la requête.

A l’origine de cette affaire, des faits d’une extrême simplicité.

Notre cliente, une commune, a reçu de la part du département du Var, une demande d’autorisation d’urbanisme en vue de la démolition des constructions.

Il s’agissait, donc, pour la commune d’instruire ce permis de démolir.

Une fois le permis de démolir accordé, l’occupant de la parcelle a cru bon de saisir le tribunal administratif de Toulon d’un recours en excès de pouvoir couplé d’une requête en référé suspension.

Notre approche : démontrer le défaut de qualité à agir du requérant contre le permis de démolir

A première vue, la recevabilité du recours ne semblait pouvoir souffrir d’aucune contestation sérieuse, puisque le requérant n’était autre que l’occupant des lieux dont la démolition était sollicitée.

L’obligation pour le requérant de démontrer sa qualité à agir contre une autorisation d’urbanisme

Adopté dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice, l’article R. 600-4 du code de l’urbanisme dispose :

« Les requêtes dirigées contre une décision relative à l’occupation ou l’utilisation du sol régie par le présent code doivent, à peine d’irrecevabilité, être accompagnées du titre de propriété, de la promesse de vente, du bail, du contrat préliminaire mentionné à l’article L. 261-15 du code de la construction et de l’habitation, du contrat de bail, ou de tout autre acte de nature à établir le caractère régulier de l’occupation ou de la détention de son bien par le requérant ».

Etant précisé que les conditions de recevabilité d’un recours contre une autorisation d’urbanisme sont listées aux articles L. 600-1-1 et L. 600-1-2 du code de l’urbanisme.

Ainsi, en application de l’article R. 600-4 du code de l’urbanisme, issu du décret n° 2018-617 du 17 juillet 2018, pour démontrer tant sa qualité que son intérêt à agir, le requérant qui demande l’annulation ou la suspension d’une autorisation d’urbanisme affectant le bien qu’il occupe doit produire le titre ou l’acte démontrant qu’il occupe de manière régulière ce bien.

Le cas de l’occupant irrégulier d’une parcelle : l’absence de qualité à agir contre une autorisation d’urbanisme

La jurisprudence administrative confirme que l’occupant sans droit ni titre d’une bien « ne justifie pas, eu égard au caractère irrégulier de cette occupation, d’un intérêt légitime de nature à lui donner qualité pour demander l’annulation d’une autorisation d’urbanisme. » (CAA Paris, 9 juin 2020, Association Comité national pour l’éducation artistique, n°19PA02117).

En l’espèce, il s’avère que le requérant, occupant de la parcelle objet du permis de démolir, ne disposait d’aucun droit ni titre d’occupation.

Si, initialement, il avait bénéficié d’une autorisation précise et révocable d’occupation de la parcelle appartenant au domaine public du département, cette dernière avait été résiliée par le département. Le département, en outre, avait sollicité le départ de l’occupant.

Pour autant, le requérant avait délibérément décidé de se maintenir dans les lieux, devenant, ainsi, occupant sans droit ni titre du domaine public.

Dès lors, dans ces circonstances et en application de la jurisprudence administrative, le requérant ne disposait pas de la qualité pour contester l’autorisation d’urbanisme.

Pour autant, le juge administratif, pour ne pas méconnaître le droit à un recours juridictionnel effectif, refuse d’opposer les dispositions de l’article R. 600-4 du code de l’urbanisme, sans avoir avoir préalablement invité le requérant à régulariser la situation en produisant les pièces requises (CE, 3 juillet 2020, n° 424293).

En l’espèce, une telle demande de régularisation n’était pas utile, sans pour autant porter atteinte au droit à un recours juridictionnel effectif, puisque le requérant, dans ses écritures et pièces produites, reconnaissait sa situation d’occupant sans droit ni titre de la parcelle du département.

En tant qu’occupant irrégulier de la parcelle objet du permis de démolir, le requérant, en vertu des dispositions de l’article R. 600-4 du code de l’urbanisme, ne disposait, par conséquent, pas de la qualité pour agir contre ledit permis de démolir.

Le juge des référés du tribunal administratif de Toulon (décision à lire ici) en a tiré les conséquences suivantes :

– il reconnaît, d’une part, l’irrecevabilité de la requête tendant à l’annulation du permis de démolir ;

– il en déduit, d’autre part, que les conclusions tendant à la suspension de l’exécution de l’arrêté devait être rejetées. 

Rejetant ainsi la requête en référé suspension, le juge des référés a, également, condamné le requérant à verser tant au département du Var qu’à la commune la somme de 2 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

A cet égard, depuis quelques mois, nous constatons, en pratique, que les juridictions administratives sont de plus en plus enclines, en référé, à prononcer des condamnations élevées au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Sur ce point, une certaine révolution est en marche.

Ce que nous avons obtenu

En tout état de cause, nous avons, ainsi, obtenu le rejet du référé suspension, permettant au pétitionnaire de pouvoir mener les travaux de démolition préalable nécessaire pour mener à bien un projet d’équipement public.

Par ailleurs, la condamnation exemplaire au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative permettra peut-être de décourager les requérants dépourvus manifestement de tout intérêt ou qualité à agir. 

Ces contentieux voués à l’échec ont pour seul effet de monopoliser la juridiction administrative et, par conséquent, de porter atteinte à la bonne administration de la justice. 

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