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Les notes de frais des élus locaux sont des documents administratifs communicables

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Les notes de frais des élus locaux sont des documents administratifs communicables

Voici un arrêt du conseil d’Etat qui risque de créer un certain malaise chez les élus, puisque de manière très laconique, qui ne laisse aucune place au doute, il est jugé que les notes de frais des élus sont des documents administratifs communicables (CE, 8 février 2023, n° 452521).

Et plus encore, ce principe souffre de peu d’exceptions. 

La consécration du droit à la communication des notes de frais des élus locaux

En premier lieu, le droit à la communication des notes de frais des élus n’est pas régi par l’article L. 2121-26 du code général des collectivités territoriales

Pour déterminer si les notes de frais des élus sont des documents administratifs communicables, le Conseil d’Etat écarte les dispositions de l’article L. 2121-26 du code général des collectivités territoriales relatif à la communication des budgets et des comptes de la commune et des arrêtés municipaux.

Pour le Conseil d’Etat, ce droit à la communication des comptes et budgets ne s’étend pas aux pièces justificatives des opérations et documents de comptabilité.

Dans la mesure où les notes de frais constituent des documents distincts des comptes et budgets communaux, le droit de communication spécial établi par cet article L. 2121-26 du code général des collectivités territoriales ne s’applique pas.

En second lieu, dès lors, le Conseil d’Etat se réfère au régime de droit commun de la communication des documents administratif

Autrement dit, le Conseil d’Etat juge que les notes de frais des élus constituent des documents administratifs au sens de l’article  L. 300-2 du code des relations entre le public et l’administration.

Dès lors, saisie d’une demande de communication, l’autorité administrative devra, en vertu de l’article L. 311-1 du code des relations entre le public et l’administration, communiquer les notes de frais des élus :

« des notes de frais et reçus de déplacements ainsi que des notes de frais de restauration et reçus de frais de représentation d’élus locaux ou d’agents publics constituent des documents administratifs, communicables à toute personne qui en fait la demande ».

(CE, 8 février 2023, n° 452521)

Ce droit à la communication est consacré de manière étendue.

Quelles notes sont concernées ?

Ce droit à la communication concerne toutes les notes de frais et reçus de déplacement, intégrant les notes de frais de restauration et reçus de frais de représentation.

Qui est concerné ?

En définitive, ce droit à la communication ne concerne pas seulement les notes de frais des élus locaux.

Sont également concernées les notes de frais des agents publics.

Quelques réserves encadrent le droit à la communication des notes de frais des élus locaux

Comme pour tous les documents administratifs, le droit à la communication s’exerce « dans les conditions et sous les réserves prévues par les dispositions du code des relations entre le public et l’administration ».

En d’autres termes, ce droit à la communication s’exerce sous réserve des dispositions des articles L. 311-5 et 6 du code des relations entre le public et l’administration.

Il appartient, ainsi, à l’autorité administrative de masquer les données non communicables.

Et, en l’espèce, il était avancé que la communication des notes de frais constituerait une atteinte à la vie privée de l’élu et des agents ainsi que des invités.

Le moyen est balayé :

« Sur le fondement de ces dispositions, la communication des documents demandés, qui ont trait à l’activité de la maire de Paris dans le cadre de son mandat et des membres de son cabinet dans le cadre de leurs fonctions, ne saurait être regardée comme mettant en cause la vie privée de ces personnes. En outre, contrairement à ce que soutient la Ville de Paris, la communication des mentions faisant le cas échéant apparaître l’identité et les fonctions des personnes invitées ne porte pas davantage atteinte, par principe, à la protection de vie privée de ces autres personnes » .

(CE, 8 février 2023, n° 452521)

Vu la formulation de ce considérant, force est d’admettre, aujourd’hui, que la prétendue atteinte à la vie privée ne saurait prospérer pour s’opposer à la communication des notes de frais.

Par ailleurs, le Conseil d’Etat appelle les autorités administratives à apprécier au cas par cas de telles demandes de communication.

Pour cela, le Conseil d’Etat précise qu’il convient de prendre en compte :

  • – la date à laquelle l’autorité administrative se prononce sur une demande de communication ;

  • – les circonstances particulières tenant au contexte de l’évènement auquel un document se rapporte.

Et, au regard de ces éléments, si une atteinte aux secrets et intérêts protégés par les articles L. 311-5 et L. 311-6 du code des relations entre le public et l’administration venait à être caractérisée, l’autorité administrative pourra, sans commettre d’illégalité, occulter ces mentions.

Mais, si une occultation est, en pratique, possible, nous tendons à croire que cette possibilité est très théorique, de sorte qu’il pourrait, selon les circonstances, être plus aisé de plaider la demande abusive (L. 311-2 du code des relations entre le public et l’administration).

En l’espèce, le Conseil d’Etat enjoint à la Ville de Paris de réexaminer la demande de communication dans un délai d’un mois à compter de la notification de sa décision.

S’il est certain que cette affaire n’est pas totalement terminée, il n’en demeure pas moins que cette décision place les élus et agents publics dans une situation peu agréable, tant il est certain que des demandes seront effectuées dans un esprit peu bienveillant.

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