Dans le cadre de la lutte contre l’habitat indigne, la loi ALUR du 24 mars 2014 a créé des mécanismes dont notamment, la déclaration de mise en location (articles L. 634-1 à L. 634-5 du code de la construction et de l’habitation) et l’autorisation préalable de mise en location (articles L. 635-1 à L. 635-11 du code de la construction et de l’habitation).
Nous allons ici nous intéresser uniquement à l’autorisation préalable de mise en location, également appelée permis de louer, et plus précisément à ses rapports avec les règles d’urbanisme.
Spoiler alert : le principe d’indépendance des législations qui s’oppose à ce qu’une réglementation ou une autorisation émise en application d’un ensemble normatif puisse faire application de normes qui lui sont extérieures (CE, 1er juillet 1959, Sieur Piard, 38893), joue pleinement ici.
Rappel synthétique autour du permis de louer
Le permis de louer est défini à l’article L. 635-3 du code de la construction et de l’habitation.
En synthèse, la mise en location d’un logement est, en vertu de ce permis de louer, subordonnée à la délivrance d’une autorisation par le président de l’établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d’habitat ou, à défaut, par le maire de la commune.
Ce permis de louer s’appliquera dans certaines zones prédéfinies.
Ces zones sont délimitées par l’organe délibérant de l’établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d’habitat ou, à défaut, le conseil municipal (article L. 635-1 du code de la construction et de l’habitation).
Ces zones sont fixées au regard de l’objectif de lutte contre l’habitat indigne et en cohérence avec le programme local de l’habitat en vigueur et le plan départemental d’action pour le logement et l’hébergement des personnes défavorisées.
Par ailleurs, la délibération prise pour délimiter les zones doit également indiquer pour quels logements une déclaration et un permis de location sont nécessaires.
Sur quels motifs refuser d’accorder un permis de louer ?
Des motifs de refus strictement définis par le code de la construction et de l’habitation
S’agissant du permis de louer, l’article L.635-3 du code de la construction et de l’habitation énumère les motifs de refus.
L’autorité compétente peut refuser l’autorisation de mise en location lorsque :
- – le logement ne respecte pas les caractéristiques de décence prévues à l’article 6 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 ;
- – le logement est susceptible de porter atteinte à la sécurité de ses occupants et à la salubrité publique.
L’article L. 635-3 du code de la construction et de l’habitation ajoute que :
- – le refus doit être motivé ;
- – le refus doit préciser la nature des travaux ou aménagements prescrits pour satisfaire aux exigences de l’article 6 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989.
Un refus de permis de louer peut-il être fondé sur des règles d’urbanisme ?
Au nom du principe de l’indépendance des législations, la réponse est non.
Le permis de louer ne peut se fonder que sur un motif visé par le code de la construction et de l’habitation.
Ainsi, le Tribunal administratif de Montreuil a jugé en ce sens :
« Un tel refus ne constitue pas un motif de sécurité ou de salubrité publique en considération duquel une autorisation de mise en location peut légalement être refusée en application des dispositions de l’article L.635-3 du code de la construction et de l’habitation citées au point précédent. En outre, le refus de mise en conformité a pour objet de censurer la méconnaissance de règles d’urbanisme qui relèvent d’une législation distincte de celle régissant les autorisations préalables de mise en location. Il s’ensuit que la société requérante est fondée à soutenir qu’en fondant les décisions attaquées portant refus d’autorisation de mise en location sur le refus en date du 25 septembre 2019, le maire de Livry-Gargan a commis une erreur de droit. » .
(TA Montreuil, 16 janvier 2023, 2108104)
Autrement dit, le permis de louer ne peut être refusé pour un motif urbanistique tel que, par exemple, le non-respect de la déclaration préalable de travaux.
Retenir un tel motif reviendrait à commettre une erreur de droit.
Dès lors que le logement destiné à être mis en location respecte les caractéristiques de décence et ne porte aucune atteinte à la sécurité ou à la salubrité publique, il convient d’accorder le permis de louer.
(Un article rédigé en collaboration avec Margaux Large)